Le loup des plaines, l'ours des montagnes

Nul obstacle du reste n'arrêtait ces animaux qui effectuaient près de 40 kilomètres par jour pour se livrer à leur principale activité : trouver de la nourriture. Les facultés d'adaptation du loup et de l'ours étaient telles qu'ils pouvaient vivre dans des milieux naturels très variés : la plaine découverte de la Bresse leur convenait tout aussi bien que les montagnes boisées du Bugey. Cependant la présence de l'homme de plus en plus pressant et hostile aux nuisibles, a conduit l'ours et le loup à modifier leurs comportements et se confiner dans des périmètres de plus en plus restreints.

Du 17e au 19e siècle, les documents d'archives sont unanimes sur ce point : les ours ont préféré se retirer très tôt dans les massifs accidentés (et donc plus difficilement accessibles pour l'homme), comme ceux du Bugey et du Pays de Gex. Quant au loup, il se manifeste au contraire surtout en Bresse. Cette région est certes très populeuse à l'époque moderne, mais l'habitat rural dans le nord ouest du département est très dispersé. Les meutes, à la vue des fermes isolées, s'enhardissent : les basses-cours, les troupeaux qui ne bénéficient d'aucune protection véritablement efficace, deviennent alors une proie facile pour les meutes affamées.

Les plaines et les montagnes

Les zones géographiques qui constituent le département de l'Ain formaient jusqu'à la veille de notre ère, une gigantesque forêt quasi-inextricable : à l'est les montagnes boisées du Jura méridional et à l'ouest le "saltus Brixiae" ou forêt de Bresse qui avait succédé au Grand Lac bressan du Tertiaire. Au néolithique, sont apparus les premiers villages de cultivateurs qui ont déboisé et défriché pour cultiver la terre. Peu à peu, la forêt verra son périmètre régresser : tout d'abord à l'époque florissante des gallo-romains et surtout au 13e siècle, période faste pour la paysannerie. Dans ce moyen-âge, la forêt limite le territoire cultivé et reste encore un espace à conquérir. Elle ne cessera de reculer sous les coups de hache : entre les 16e et 18e siècles, la surface boisée diminue en France de 30 %. Au milieu du 19e siècle, époque de l'extermination de l'ours et du loup, la forêt est totalement dégradée et fragilisée. Elle ne représente plus que la moitié de ce qu'elle couvre aujourd'hui. Sans l'entrée en vigueur en 1827 d'un code forestier et une politique de gestion des bois efficace, la forêt française, dans l'Ain comme ailleurs, aurait sans doute disparu.

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