Sur le terrain de la symbolique : de la peur à la passion

Au fil des âges, l’image de l’ours ou du loup a varié. Dès l’époque néolithique, où les hommes ont commencé à élever et rassembler des troupeaux, ours et loups sont devenus des rivaux, prédateurs du mouton, de la volaille et du chien.

Dans le même temps apparaissent des divinités empruntant leur aspect : le dieu-loup Oupouaout des Egyptiens ou, plus près de nous, les divinités gauloises, Belenos, le dieu-loup ou Dea Artio, la déesse à l’ours dont des représentations du 3e siècle après J.C. ont été retrouvées en Suisse.

Au Moyen-âge, si l’image positive demeure présente, notamment dans l’héraldique, c’est la diabolisation qui l’emporte, sous l’influence de l’Eglise. Ours et loup symbolisent une série de défauts bien humains tels que cruauté, ruse mais aussi goinfrerie, paresse et sottise.

Cependant, dès le 19e siècle, le danger recule puisque l’extermination bat son plein. Alors apparaissent les premiers signes de sympathie et de pitié accordées au loup, dans la littérature par exemple. L’apparition des louveteaux dans le scoutisme est aussi un signe de cette réhabilitation.

Puissance et Protection

Les animaux furent parmi les premières figures utilisées par les combattants au XIIe siècle pour se reconnaître au cœur de la mêlée. Environ un tiers des armoiries en Europe sont animalières. Sur celles-ci, moins de 1 % (soit peut-être 500 familles) utilisent l’image du loup ; la proportion est sensiblement la même pour l’ours.

Il s’agit souvent d’armes dites « parlantes », c’est-à-dire fondées sur un jeu de mots entre le nom de l’animal et celui du porteur des armoiries.

Est-ce le cas pour les armes de Belley, qui représentent une louve « de sinople » (couleur verte), sur un fond d’argent ? Il n’y a pas d’explication certaine du choix de cette figure pour la capitale du Bugey. S’agit-il d’une imitation de Rome, dont l’emblème est la louve qui allaita Rémus et Romulus, les fondateurs de la ville ? Ou bien d’une allusion à Belenos, qui aurait donné son nom à la ville ? L’image positive du loup, sa robustesse et son courage inspirant le respect, ont pu aussi faire opter pour cette représentation.

 

Depuis l’époque paléolithique jusqu’à l’ère chrétienne, dans l’hémisphère nord, le culte de l’ours a été l’un des cultes animaliers les plus répandus. Dans les pays de tradition germanique, l’ours est considéré comme le roi des animaux.

Dans les armes de la ville de Berne, son nom forme un jeu de mots avec le nom de la ville (ours se dit « bär » en allemand.).

Au moyen-âge, l’image de l’ours est dépréciée par l’Eglise. Le lion et l’aigle le remplacent comme emblèmes de la royauté. En 1515, le roi de France François 1er remporte la victoire sur les Suisses à la bataille de Marignan : les auteurs français célèbrent alors la victoire en représentant un lion (le roi de France) tenant un ours (les cantons suisses) enchaîné.

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Cruauté et Péché

La symbolique chrétienne a porté à des sommets l’image négative de l’ours mais surtout du loup qui représente le péché, le mal absolu, opposé à l'agneau de Dieu, donc au Christ.

Il existe, certes, un saint Loup et un saint Ours et l’hagiographie chrétienne regorge de récits de loups apprivoisés. Mais ils symbolisent alors la soumission du mal à Dieu comme dans la légende de saint Trivier.

La légende rapporte qu’aux temps mérovingiens, saint Trivier, perdu dans une vaste forêt, fut sauvé par l’apparition de deux loups pacifiques, qui le guidèrent sur le chemin du bourg aujourd’hui appelé Saint-Trivier-sur-Moignans. Dans l’église de Saint-Trivier-de-Courtes, une statue du saint le représente accompagné d’un de ces loups bienfaisants.

Les contes populaires et fables, de La Fontaine à Perrault, ne font que traduire la volonté d’éradiquer la bête malfaisante et cruelle (Le loup et l'agneau), voire ingrate, sans malice ou grotesque comme dans Le Roman de Renard, ou Les Trois petits cochons.

 

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Beauté

La représentation des animaux est très dépendante du contexte mental des sociétés. On trouve déjà des peintures animalières dans l’art rupestre de la préhistoire.

Si une volonté symbolique motiva de nombreux artistes pour réaliser des peintures ou sculptures, l’animal est parfois représenté en tant que tel, en mettant en valeur sa morphologie, son élégance ou sa puissance. Un art purement animalier prend naissance au 19e siècle.

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Fragilité, pitié

La réhabilitation de nos deux prédateurs s’est imposée peu à peu dans les esprits. Elle débute au 19e siècle, lorsque les poètes et écrivains romantiques valorisent la nature et alors que leur raréfaction progressive éloigne le danger. Ils deviennent les symboles d’une nature mythique, sauvage et préservée.

Leurs espèces sont aujourd'hui protégées par des textes juridiques officiels : conventions internationales, européennes et arrêtés nationaux. L'ours brun et le loup sont inscrits au niveau international dans la Convention de Washington, au niveau européen dans la Convention de Berne. L'ours est déclaré espèce protégée depuis 1992 en France, le loup depuis 1981 par l'arrêté interministériel modifié en 1996.

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Douceur

L'ours en peluche est apparu au début du 20e siècle, à la suite d'une aventure survenue à Théodore Roosevelt, président des Etats-Unis: lors d'une partie de chasse, il refusa de tuer un jeune ours noir. La presse rendit cette affaire très populaire: un fabricant de jouet en conçut l'idée d'un ours en peluche et le surnomma Teddy (diminutif de Théodore) Bear (Ours en anglais).

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